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L'ENGAGEMENT
DANS
LE MONDE RURAL :
Collège Alphonse Daudet
2005-2006
INTRODUCTION : LE
GARD SOUS LE
REGIME DE VICHY
Zouhair
Moubssit
Clara Bringuier
La
période 1940-1944 est marquée par une
dégradation des conditions de vie pour
les populations gardoises.
Avant
la guerre, le Gard vit à peu près en autarcie,
avec une agriculture dominée par
la vigne qui occupe 60% des terres cultivables. Dans les
vallées des gardons,
de la Cèze et du Rhône, elle partage les terres
avec les arbres fruitiers, les
céréales, les légumes et les prairies.
En général, dans le monde rural gardois,
les revenus sont assez modestes.
Après
l’armistice du 22 juin 1940, qui marque la défaite
des armées françaises, les
conditions de vie se dégradent rapidement. C’est
tout d’abord l’aggravation des
conditions matérielles, avec les problèmes de
ravitaillement. En effet, dès la
fin 1940, le Gard souffre du manque de produits essentiels comme les
légumes,
la viande. Les mesures de rationnement ne permettent pas
d’améliorer la
situation : en décembre 1940, dans la
région d’Alès, la moitié
seulement
de la ration légale de viande et de charcuterie a
été réellement distribuée.
Dans de nombreuses communes, les Gardois manquent aussi
de vêtements, de chaussures, de combustible
pour se chauffer, d’engrais et de semences pour les
cultures …La situation
ne fait que se dégrader les années suivantes,
surtout après l’arrivée des
troupes allemandes dans le département, le 11 novembre 1942.
Les
populations souffrent aussi des prélèvements de
main-d’œuvre ordonnés par les
Allemands : fin 1942, la Relève oblige à
envoyer des ouvriers spécialistes
dans les usines allemandes. Puis, en février 1943, la loi
sur le Service du
Travail Obligatoire impose le départ des jeunes pour aller
travailler dans
l’économie de guerre allemande. Les Gardois sont
aussi marqués par les
nombreuses arrestations et déportations qui ont lieu pendant
toute la période,
d’abord dans des camps d’internement en France,
puis dans les camps de concentration
en Allemagne. Les 25 et 26 août 1942, 59 hommes, femmes et
enfants juifs sont
raflés à Nîmes puis
déportés. Après
l’arrivée des Allemands dans le Gard, le 11
novembre 1942, ceux-ci mènent plusieurs
opérations meurtrières de représailles
contre les résistants : le 1er
juillet 1943 contre le premier
maquis d’Aire-de-Côte, ou le 29 février
1944 contre le maquis d’Ardaillers
(voir chronologie). Des innocents sont arrêtés et
maltraités, certains sont
assassinés pour faire peur aux populations, comme les quinze
otages pendus à
Nîmes, le mars 1944.
Tout
cela explique que les populations gardoises soient, dans leur grande
majorité,
hostiles au régime de Vichy et aux Allemands.
PREMIERE
PARTIE : L’EVOLUTION DU
MAQUIS
Clara
Bringuier
Medina Hidèche
Quelles ont
été les
grandes étapes dans l’histoire du maquis ?
A)
LES PREMIERS
REGROUPEMENTS
Le
premier maquis du Gard est né de l’initiative de
quelques résistants de l’Armée
Secrète. Avant de parler d’un maquis, l existe
d’abord un réduit et une « pouponnière »
où sont cachés de jeunes réfractaires
qui refusent de partir travailler en
Allemagne
- en janvier 1943, une
quinzaine d’ouvriers spécialistes
réfractaires sont cachés dans la
« Baraque
du Bidil », près de la maison
forestière d’Aire-de-Côte, dans
l’Aigoual. Mais, ils se dispersent moins de deux mois
après.
- Le 3 mars 1943, un
plombier de Nîmes, René Rascalon
cache des réfractaires dans une
« pouponnière »
près de Nîmes. Puis, pour des raisons de
sécurité, il
les amène dans les montagnes des
Cévennes : d’abord dans la ferme du
Barrel, à Saint-André-de-Valborgne, puis
à la Baraque du Bidil. Avec l’arrivée
de nouveaux réfractaires (début du STO en
février 1943), le maquis compte
jusqu’à 120 hommes, dirigés par Jean
Castan. Mais certains s’en vont,
découragés par le manque d’armes.
B)
L’ATTAQUE ALLEMANDE
Le
1er juillet 1943, le camp est attaqué
par les parachutistes
allemands après la trahison d’un ancien maquisard
qui avait été chassé du
groupe. Trois maquisards sont tués dans le combat (en fait
les résistants n’ont
pas pu se défendre), et quinze sont blessés, dont
quatre meurent de leurs
blessures faute de soins. 43 maquisards sont faits prisonniers. Parmi
eux, deux
résistants d’origine allemande sont
fusillés ; les autres sont
déportés
dans les camps de concentration, où 22 d’entre eux
sont morts. Seulement 19 en sont
revenus, marqués par les mauvais traitements.
Une
partie des maquisards, dont Jean Castan, parvient quand même
à s’échapper et à
se réfugier dans des fermes voisines.
C)
LES FUSIONS
Au
printemps 1943, de nombreux jeunes des classes 1941 et 1942 refusent de
partir
travailler en Allemagne comme l’impose le STO. Les groupes de
résistants
gardois, plutôt implantés dans les villes,
décident alors d’organiser d’autres
maquis, dans les zones rurales pour les cacher, puis les
préparer au combat.
- près de Lasalle, Robert
Francisque, régisseur du château de
Malérargues et Guy Arnault, boulanger à
Lasalle cachent des réfractaires à partir
d’avril 1943
- en avril 1943 aussi, le
pasteur protestant Laurent Olivès crée le maquis
d’Ardaillers ou maquis de la
Soureilhade (nom de l’endroit où il est
installé). Attaqué par les SS de la
Division Hohenstaufen le 28 février 1944, le maquis se
réfugie en Lozère, à
Vébron.
Les
rescapés d’Aire-de-Côte rejoignent
d’abord le groupe de Lasalle pour former le maquis
de Lasalle, qui doit souvent changer d’emplacement
pour échapper aux
Allemands. Par exemple, le 10 mai 1944, il perd un de ses chefs, Robert
Francisque, abattu par des Waffen SS. Le 12 juillet 1944, le maquis de
Lasalle
fusionne avec le maquis de la Soureilhade pour former le maquis Aigoual-Cévennes
qui compte, à ce moment là, 350 hommes.
D)
LE PLUS GRAND
MAQUIS GARDOIS
Ce
maquis est commandé par le colonel Colas
(« Matignon ») et par un
Directoire qui comprend R. Rascalon, L. Olivès et Marceau
Bonnafous, responsable
du groupe franc. Il est renforcé par
l’arrivée de nombreux jeunes, puis
par le ralliement d’autres maquis comme celui du Col de
Mercou et celui du Col
de l’Homme Mort, ce qui le fait passer à 1000
hommes fin juillet 1944 et à 1500
vers le 15 août. A ce moment, 450 gendarmes rejoignent le
maquis qui compte
jusqu’à 2500 hommes au moment des combats de la
libération de la région.
E)
LE
ROLE DU CORPS
FRANC
Le
Corps Franc est un groupe qui dépend
du
maquis et qui est chargé de mener des opérations
pour récupérer du matériel
indispensable à la vie du maquis. Il possède un
effectif limité : rarement
plus de dix hommes, dirigés par Marceau Bonnafoux
et Christian Cayet,
avec Jean Castan, Léon
Héraud, Fernand Bompart, Georges
Peillon… Pour des raisons de
sécurité, afin de ne pas faire courir de
risque aux autres maquisards, le groupe est stationné assez
loin de Lasalle et
du maquis. Il ne cherche aucune action d’éclat
mais mène deux sortes
d’opérations :
-
des opérations d’isolés,
effectuées par
un ou deux résistants : transmission
d’ordres, de courrier,
missions d’information, transport de tickets
d’alimentation…
- des opérations de
groupe : par exemple, fin mars 1944, le Corps Franc a
été informé de
l’existence de plusieurs camions de
l’armée française, camouflés
dans la maison
forestière du Marquairès, en Lozère.
Marceau Bonnafous monte l’opération et la
réussit, ce qui permet de récupérer,
pour le maquis de Lasalle, trois camions,
deux cents couvertures, vingt fusils de guerre et leurs munitions.
1943
- janvier :
formation d’un premier
« réduit», à Aire-de-Côte,
avec une vingtaine de
réfractaires refusant le départ en Allemagne.
- début
mars : installation, près de Nîmes, au
Mas
Rouquette, d’un maquis Armée
Secrète, fondé par René
Rascalon
- 15 mai : transfert des réfractaires à Aire de Côte
- mai: la pasteur Laurent Olivès installe une dizaine de réfractaires à La Combe (près de Valleraugue) : c’est le début du maquis d’Ardaillers
- mars : formation du maquis de Lasalle
- 01-07 : attaque des troupes allemandes contre le maquis Aire-de-Côte : 7 résistants tués, 15 blessés
- 04-08 : fusion des maquis de Lasalle et d’Aire-de-Côte
1944
- 01-02 : défilé des maquisards dans Lasalle, dépôt de gerbes au monuments aux morts
- 29-02 : attaque allemande contre le maquis d’Ardaillers
- 12-04 : attaque allemande contre les maquis de la Vallée Française
- 10-05 : R. Francisque tué par les Waffen SS à Lasalle
- 16-06 : combat entre maquisards et troupes allemandes au château de Cornély (Lasalle)
- 12-07 : création du maquis Aigoual-Cévennes né de la fusion des maquis de Lasalle et de la Soureilhade- Ardaillers
- 10-08 : échec d’une tentative du maquis Aigoual-Cévennes pour prendre le contrôle du Vigan , mort de M. Bonnafoux (« Marceau »)
DEUXIEME
PARTIE :
LES HOMMES
DU MAQUIS
A)
L’ ENGAGEMENT DANS LA
RESISTANCE :
DOUZE TEMOIGNAGES
Priscillia
Mesa Garcia
Pourquoi et comment
s’engager ?
Douze
maquisards de l’Aigoual-Cévennes ont
complété un questionnaire tiré de la
« Lettre de la Fondation de la
Résistance », en décembre 2002. Agés de 15
à 21 ans au moment de la défaite,
ils expliquent les raisons et les formes de leur engagement. Nous
pouvons
retenir 5 idées principales.
1)
Sur 12, seuls 4 jeunes n’étaient pas
engagées avant la guerre. Parmi les 8
autres, 3 sont engagés dans des partis et
syndicats de gauche antifascistes,
ce qui peut expliquer leur engagement résistant (1 au parti
communiste, 1 au
parti socialiste, 1 au syndicat CGT). Le plus marquant est que 6 sur 12
signalent leur engagement religieux protestant :
pour la moitié de
ces résistants, les valeurs de la religion protestante
(l’attachement à la
liberté individuelle, le souvenir des
persécutions contre les Camisards
cévenols) ont joué un rôle dans leur
entrée en résistance. Il faut souligner
aussi l’impulsion donnée par les pasteurs
cévenols, comme le pasteur Olivès,
qui a créé et dirigé un maquis.
2)
Les sentiments de ces jeunes en 1939-1940 reflètent un peu
l’état d’esprit de
tous les Français. Chez 3 sur 12, c’est
l’inquiétude (citée 2 fois) et la
crainte qui l’emportent car le père de famille a
été mobilisé. Mais les
sentiments dominants sont plutôt la confiance en la
victoire (mentionnée
6 fois) et la satisfaction d’en finir rapidement
avec Hitler (exprimée
aussi 6 fois). Par conséquent, la déroute rapide
des armées françaises et la
demande d’armistice de Pétain sont ressenties avec
une grande stupéfaction
(citée 6 fois), honte et déshonneur (4 fois),
tristesse et désarroi (3
témoignages).
3)
Comment ces 12 personnes sont-elles passées d’un
sentiment d’abattement à la
volonté de se battre ? A la question
« vos êtes-vous engagé par
réflexe ou la suite d’une longue
réflexion ?», 6 des 8
résistants qui ont
répondu ont noté que leur engagement
avait été un réflexe.
Celui-ci a trois motivations principales, citée chacune 7
fois : le
patriotisme, le refus de l’occupation du
pays et la volonté de
lutter contre l’idéologie nazie.
Viennent ensuite le refus de l’armistice
(cité 5 fois), l’appel du 18 juin et
l’engagement de Vichy dans la voie de la
collaboration (chacun cité 3 fois). Ainsi, on peut souligner
que l’engagement
dans la Résistance est d’abord une lutte
pour les libertés, les libertés
individuelles (supprimées par les nazis et le
régime de Vichy) et la liberté
d’un pays.
La
famille et les proches jouent souvent un rôle important dans
cet
engagement : pour 9 sur 12, la famille
était pleinement au courant des
activités, et, dans 3 cas, cet engagement concerne
toute la famille proche.
Cinq des personnes interrogées soulignent qu’elles
sont entrées en Résistance
par l’intermédiaire d’un ami :
par exemple, un des résistants que son
engagement est d’abord lié à son
amitié avec Robert Francisque.
4)
Toutes les personnes interrogées ont appartenu à
un maquis, qui a participé à
des combats pour la libération du Gard. Mais elles citent
aussi d’autres formes
de lutte : 4 ont effectué des missions de liaison
entre groupes, ce qui
est vital pour mener des actions coordonnées efficaces.
Trois parlent de la
distribution de tracts et de graffitis, pour contrer la propagande de
Vichy.
Deux ont caché des personnes
persécutées (soit des jeunes
réfractaires refusant
de partir en Allemagne, soit des juifs). Les autres formes de lutte
citées sont
les sabotages (pour gêner l’ennemi), la
surveillance des allées et venues des
Allemands et des Miliciens (pour prévenir les
résistants d’un danger),
l’écoute
de la radio anglaise (pour échapper à la censure
de Vichy), le refus d’obéir
aux ordres (cité par un militaire).
5)
De leur vie quotidienne au maquis, les résistants
retiennent, pour la plupart,
les mêmes idées et les mêmes
images : c’est la précarité et
les
difficultés matérielles (la faim, dormir
dehors…un des résistants résume sa vie
matérielle dans la résistance par
l’expression
« peuchère » !). Il faut
y rajouter le sentiment de peur, le fait d’être
toujours sur le qui-vive :
8 sur 12 affirment qu’ils avaient conscience des risques,
pour eux, pour leurs
proches et pour les populations des alentours (craintes
sûrement renforcées par
les opérations punitives lancées par les SS fin
février 1944 dans les
Cévennes). Mais ces difficultés sont
surmontées grâce à
« une confiance
inébranlable », à
l’ «exaltation » du
combat et surtout (c’est
mentionné 8 fois) grâce à la
camaraderie, au sentiment de fraternité entre tous
ceux qui partagent la même vie, les mêmes
difficultés et la même lutte.
B)
QUELQUES CHEFS DU
MAQUIS
Médina Hidèche
Qui
dirige le maquis ?
Robert
Francisque : né à
Saïgon en
1906, il a été militaire de carrière,
puis est devenu régisseur de la
propriété
de Malérargues. Il est un des responsables du maquis de
Lasalle dès sa création
et s’occupe, en particulier, de l’école
des cadres mise en place à Malérargues
pour apprendre aux réfractaires à se battre. Il
participe aussi aux opérations
du Corps Franc (sabotages, coups de main). Pour aider à
payer le ravitaillement
et l’équipement des maquisards, il vend sa
collection de timbres rares. Il
prend même le risque de rentrer dans la Milice,
chargée de traquer les résistants,
ce qui lui permet de renseigner les résistants. Mais il est
tué par les SS
allemands le 10 mai 1944.
René
Rascalon : né en 1898, il est
artisan plombier à Nîmes. Il regroupe
d’abord des Nimois qui veulent continuer
à se battre et, avec eux, organise des sabotages et des
manifestations, comme
le 11 novembre 1942 à Nîmes. A partir du
début 1943, il cache des réfractaires
au STO chez lui, puis les emmène à Saumane dans
les Cévennes : c’est le
début du premier maquis. Nommé chef
départemental des maquis, il s’occupe de
ravitailler le maquis qui se déplace plusieurs fois. En
juillet 1944, il est un
des chefs de l’Aigoual-Cévennes. Il est
décédé en 1982
Marceau
Bonnafoux:
Né en 1910 à Anduze, il
dirige une petite entreprise de décoration à
Nîmes. Entré dans la résistance,
il distribue des tracts à Nîmes, et inscrit des
graffitis contre le régime.
Recherché par la police, il rejoint le maquis de Lasalle
à l’automne 1943 et
devient le chef du Corps Franc chargé des coups de main qui
permettent
d’équiper et de ravitailler le maquis. Mais, le 10
août 1944, il est tué lors
de l’attaque de la garnison allemande du Vigan. Sur sa
stèle au Vigan, on peut
lire « il fut le premier partout même
à la mort ». Pour lui rendre
hommage, le commandant Colas l’a décrit comme
« héros extraordinaire de
cette guerre extraordinaire ».
Jean
Castan :
Né au Havre en 1920
mais issu d’une famille gardoise, il s’engage en
1939 dans l’armée de l’air
puis, après la défaite, il est muté
dans la marine à Toulon. Il démissionne en
septembre 1942 et choisit d’entrer dans la
clandestinité pour se battre. Quand
le premier maquis est installé à
Aire-de-Côte, c’est lui qui est choisi par
Albert Thomas, chef départemental de
l’Armée secrète pour commander le camp.
Rescapé de l’attaque allemande, il rejoint le
maquis de Lasalle, puis devient
responsable du Corps Franc après la mort de Marceau
Bonnafoux.
C)
L’AIDE
A LA RESISTANCE
Ester Chambonnet
Comment
aider les personnes persécutées,
malgré les risques ?
1) La fourniture de faux
papiers
Elle est vitale, car la nourriture
est rationnée, donc
on ne peut s’en procurer que si on a des papiers
d’identité pour obtenir une
carte de rationnement. Mais, pour tous ceux qui sont
recherchés par la police
ou les Allemands (par exemple les réfractaires au STO), il
est impossible de
présenter ses vrais papiers.
Certains fabriquaient de faux
papiers d’identité ou
aidaient à en fabriquer, avec, parfois la
complicité de policiers ou d’employés
de mairies. Par exemple, Jeanne Boyer, institutrice
à
Saint-André-de-Valborgne, fournit à des personnes
vivant dans la clandestinité
des faux papiers obtenus d’un policier résistant
de Toulouse. A Mandagout, le
pasteur Georges Gillier dispose d’un faux
tampon de la mairie de Nîmes,
confectionné avec la complicité du directeur de
la Caisse d’Epargne du Vigan et
l’utilise pour fabriquer des cartes
d’identité.
2) Le ravitaillement des
résistants
Même si les maquisards peuvent tirer de la
nature quelques ressources
(châtaignes à l’automne), ils
dépendent, pour leur ravitaillement, de l’aide de
la population des campagnes. Certaines mairies les aident de
façon clandestine,
par exemple à Bréau-et-Salagosse, où
le secrétaire de mairie leur fournit des
cartes d’alimentation. Mais ce sont surtout les populations
des environs qui
les ravitaillent, soit en leur donnant directement de la nourriture
(les
agriculteurs, ou les commerçants comme le boucher Martin
ou le boulanger
Guy Arnault à Lasalle) soit en leur
procurant un travail saisonnier,
comme la famille Malzac, à Mandagout.
3) Cacher des réfractaires
et des personnes recherchées
Sous le régime de Vichy, de nombreuses
personnes sont obligées de se
cacher : les jeunes qui refusent de partir travailler en
Allemagne, les
opposants à Pétain et aux Nazis, les juifs qui
sont recherchés pour être
déportés. Beaucoup se réfugient dans
les régions rurales peuplées comme
l’ouest
et le nord du Gard. Les témoignages rapportés par
Aimé Vielzeuf montrent que
les paysans cévenols cachent ces personnes
persécutées en attendant de pouvoir
les orienter vers les maquis ou de trouver des filières qui
les feront passer
en Espagne ou en Suisse.
- dans la région entre
Saint-Ambroix et Barjac, en 1943, des agriculteurs
résistants qui appartiennent
au maquis « Feu », comme les
frères Chabrier , cachent des
réfractaires au STO qu’ils aident ensuite
à gagner les maquis de l’Armée
Secrète
- A Mandagout, à la
demande du pasteur Gillier, les familles Abric,
Pelatan…abritent des allemands
antinazis réfugiés en France depuis
l’arrivée au pouvoir d’Hitler
- A Sainte-Croix-de-Caderle, en 1941, Hélène et Fernand Auriol hébergent dans leur ferme du Moulin trois juifs, un couple de diamantaires d’Anvers, M. et Mme Getzeller et Frida Semmelman, une adolescente séparée de sa famille. A Saint-Hilaire-de-Brethmas, la famille Daufès accueille une vingtaine de réfugiés juifs dans leur propriété agricole du « Chalet ».
4)
Un exemple : le témoignage de Pierre Guiraud,
à Saint-Hippolyte-du-Fort
A Saint-Hippolyte-du-Fort, de 1940
à 1944, de
nombreuses familles cévenoles qui étaient contre
le régime de Vichy et les
nazis et qui voulaient retrouver une France Libre aident les maquisards
des
maquis environnants. Pour cela, des réunions
secrètes sont tenues chez des
partisans, comme chez M. Armand Gaillardon. La
plupart du temps, elles
se passent le soir, à l’abri des regards
indiscrets, car l’endroit était très
surveillé. Parfois, certains habitants peuvent nouer des
liens avec des soldats
allemands antinazis, qui leur apportent un peu de nourriture (boule de
pain
noir, paquet de beurre, tabac…), comme le soldat
« Paul » à la
famille Guiraud.
Certaines familles
cévenoles apportent des provisions
aux maquisards, avec la complicité des gendarmes qui ont
connaissance de ce
trafic mais ne disent rien. Les résistants comptent aussi
sur ces habitants
pour les prévenir au cas où les SS
viendraient essayer de les arrêter.
Chacun à sa
manière peut aider les maquisards :
par exemple, certains docteurs montent au maquis ou les rejoignent dans
leur
cachette pour leur donner des soins, comme le docteur Roman ou le
docteur
Laget. D’autre part, certains artisans mettent leurs services
à la disposition
des résistants, comme des cordonniers en réparant
leurs chaussures ou en leur
fabriquant des ceinturons.
Enfin, pour assurer la liaison avec
les autres maquis,
des habitants des villages cévenols servent
d’intermédiaires pour transmettre
des messages, comme Pierre Guiraud qui cache des
messages dans sa pompe
à vélo.
Ainsi, toutes les
catégories de la population, chacune
à sa manière, peut apporter une aide aux
résistants.
TROISIEME
PARTIE : LE MAQUIS AIGOUAL-CEVENNES ET
LA
LIBERATION
DU GARD
Raphael Virga
Comment le maquis a-t-il
participé à la libération du
département ?
Le
12 juillet 1944, au village de l’Espérou, les
maquis Armée Secrète
d’Ardaillès
et de Lasalle fusionnent : c’est la naissance du
maquis Aigoual-Cévennes,
le plus puissant des Cévennes. Dès ce
moment-là, il compte plus de 400 hommes
- L’armement : le maquis reçoit aussi
du matériel parachuté par les
Alliés. Près de Montdardier, sur le Causse de
Blandas, 64 containers remplis de
fusils mitrailleurs, de fusils, de grenades arrivent à la
mi-juillet. D’autres
parachutages, organisés par le groupe de la Section
Atterrissages et
Parachutages dirigé par Georges Pennincx
ont lieu dans les nuits du 30
au 31 juillet 1944 et du 14 au 15 août 1944.
- Les chefs : le maquis est commandé
par un directoire. Celui-ci
comprend les chefs des maquis d’origine, le pasteur Olivès
(Ardaillès), René
Rascalon et Guy Arnault (Lasalle), Marceau
Bonnafous (chef du Corps
Franc) et le commandant d’aviation Colas
(« Matignon ») envoyé
par la direction de la Résistance, avec l’accord
du gouvernement provisoire du
général De Gaulle
à Alger. Le maquis prend tellement d’importance
que
les Alliés souhaitent être en relation permanente
avec lui : le 25 juillet
1944, ils envoient une mission
« Jedburgh » composée
de deux
officiers, le major anglais Sharp, le lieutenant
français Pougnon
et un opérateur radio américain, « Johnny »,
qui rejoignent le
maquis à l’Espérou.
- Les actions à la
Libération : Les maquis entrent
vraiment en action après les débarquements des
Alliés
1) Après le
débarquement en
Normandie, le 6 juin 1944, les résistants
harcèlent les troupes d’occupation en
attaquant les convois isolés, en sabotant les voies
ferrées et les lignes
téléphoniques de la Wehrmacht. Le maquis
Aigoual-Cévennes participe à plusieurs
opérations : par exemple, le 18 juillet 1944,
à Pont d’Hérault contre un
camion de l’armée allemande (sur 18 soldats
allemands, 7 tués et 11 blessés
faits prisonniers). Mais le 10 août 1944, en tentant de
neutraliser la garnison
allemande au Vigan, le chef du Corps Franc,
« Marceau » est tué. Jean
Castan le remplace à la tête du Corps
Franc
2) Après le
débarquement en
Provence, le 15 août 1944, Hitler donne l’ordre
à ses troupes de quitter le sud
de la France et de se replier vers le nord-est. Le maquis
Aigoual-Cévennes
reçoit alors la mission de «tenir et neutraliser
la route nationale 99»,
c’est-à-dire de bloquer ou
d’empêcher ce repli. Elle doit, en particulier
s’opposer au passage de deux colonnes allemandes, venues de
Toulouse et de
Rodez. Le 25 août, quand ils apprennent que les troupes
allemandes arrivent,
les maquisards changent les panneaux routiers, ce qui provoque la
dispersion des
soldats. Les maquisards attaquent alors à
Saint-Hippolyte : ils tuent 38
Allemands, en blessent une cinquantaine et font 250 prisonniers. Le 26
août,
ils encerclent les Allemands à Salinelles, près
de Sommières, et détruisent une
partie de la colonne allemande, avec l’aide de
l’aviation alliée….Les combats
se poursuivent jusqu’au 28 août et
coûtent la vie à 55 résistants. Mais
les
Allemands, eux, ont des pertes plus
élevées : environ 200 tués et
400
blessés. Au total, avec les actions de tous les maquis, 3500
soldats allemands
sont mis hors de combat.
Après
la libération du Gard, de nombreux maquisards
d’Aigoual-Cévennes ont choisi de
poursuivre le combat, en s’engageant comme volontaires dans
la Brigade du
Languedoc, intégrée dans la 1ère
Armée Française.
Aimé
Vielzeuf, On les appelait les bandits, éditions Lacour, 1967
Aimé
Vielzeuf, au temps des longues nuits, éditions Lacour, 1969
Aimé
Vielzeuf, Quand le Gard résistait, tome 1, le temps des
pionniers, éditions
Lacour, 1994
Aimé
Vielzeuf, Quand le Gard résistait, tome 2, dans le secret
des bois, éditions
Lacour, 1997
Aimé
Vielzeuf, Quand le Gard résistait, tome 3, sang et
Lumière, éditions Lacour,
1998
Article :
Richard Seiler, le maquis
Aigoual-Cévennes en 1944
Questionnaire
tiré de la « Lettre de la Fondation de la
Résistance », en décembre
2002 : douze réponses (archives de M. Chirat)
Photos : archives Aimé Vielzeuf